Les disques en boucle #5

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Samba Touré

Adoubé par Ali Farka Touré en personne en son temps, Samba Touré (aucun lien, fils unique) s'impose peu à peu comme l'ambassadeur idéal de la musique malienne depuis le décès de son génial mentor en 2006. Avec Wande, il dit être revenu aux basiques : du chant, de la guitare électrique et du tama (tambour mélodique très populaire en Afrique de l'Ouest). Du coup, ses chansons dégagent comme un drôle de parfum d'évidence. Elles pourraient avoir été conçues en 1599 comme en 1995 qu'on n'y trouverait rien à redire. Mieux : elles auraient été initiées en 1599 et terminées en 1995 qu'on trouverait ça normal. "Ne l’appelez pas desert blues ou rock africain s’il vous plaît... Cette musique n’a pas besoin de ce genre d’étiquette" implore le Malien dans la présentation de son disque. On va donc l'écouter et juste dire que "Hawah", "Hayame" et "Irganda" s'intègrent parfaitement dans la production du label Glitterbeat et à la programmation du Grigri. Ce qui veut dire beaucoup.


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Makaya McCraven

Pour comprendre ce disque, il faut lire son sous-titre : Chicago x London Mixtape. Voilà, tout est dit : Where We Come From, c'est une jam géante entre les ressortissants des deux villes les plus suractives du jazz de ces derniers mois. Comme un symbole, elle sort sur International Anthem, label de l'Ilinois qui génère autant du free jazz que du post-rock ; comme un (autre) symbole, elle a été enregistrée et mixée live au Total Refreshment Centre, la salle de l'East London où sont véritablement "nés" Shabaka Hutchings et ses multiples groupes (The Comet is Coming ou Sons of Kemet). D'un autre côté, quand on dit jazz, on réduit grandement le champ des possibles de son maître de cérémonie, le batteur américain Makaya McCraven - ce n'est pas pour rien s'il emploie le terme de "mixtape" d'ordinaire réservé au monde du hip-hop. Résultat, cette rencontre transatlantique sonne davantage comme un DJ-set crade, éclectique et rentre-dedans que comme un gentil concert bien capté. Et c'est tant mieux. À classer autant au rayon drum'n'bass qu'au stand impro. Parfait pour Le Grigri.


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Omas Sextet

Clairement, ça sent la mytho. On a bien l'impression que ce fameux James "Creole" Thomas n'existe que dans le cerveau de l'Anglais Reginald Omas Mamode IV. Officiellement, c'est son cousin des Caraïbes. Officieusement, ça ressemble gros comme un maison à un nom d'emprunt pour sortir des projets plus "jazz" et ne pas interférer avec ses aventures électro ou soul. Madlib s'était fait le spécialiste de la chose avec son Yesterdays New Quintet où il jouait en réalité lui-même de (presque) tous les instruments. Et puis, au final, on s'en fout un peu de savoir qui joue sur cet album du label du flûtiste Tenderlonious, 22a. Car Omas Sextet est tout bonnement addictif comme le Pastis en été. Une fois qu'on a mis le doigt dedans, c'est foutu, on en voudra toujours plus quitte à s'en dégoûter le soir et recommencer le lendemain comme si de rien n'était. Un disque d'acid jazz tropical qui donne envie de croire aux groupes imaginaires plus que dans les divinités réelles.

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Ric Wilson

La référence est claire : sur la pochette de Banba, Ric Wilson se prend pour Basquiat. Traduction : il se veut pop et brut, coloriste et coloré, artiste de rue et icone contemporaine. Mais aussi et surtout (super)héros de la culture afro-américains au milieu de Kendrick Lamar ou de Shaquille O'Neal. Car le rappeur du label de BadBadNotGood et Hanni El Khatib (Innovative Leisure) le répète comme un mantra : "Black Art Not Bad Art" (d'où l'acronyme du titre). On le savait déjà, mais il l'entonne avec une belle humeur contagieuse. Proche du Chance The Rapper des débuts (époque Acid Rap), cet EP est un bel échantillon de hip-hop made in Chicago : lumineux, mélodieux et sûr de lui. Il faut croire que ça donne des ailes de venir de la ville de Barack Obama et Kanye West. Pas sûr que Ric Wilson ferait autant le malin s'il était né à Saint-Cyr L'École.