El Khat

Saadia Jefferson, disque de la semaine du Grigri du 26/11 au 01/12

Au départ, on pourrait croire à un livre de la fameuse Collection Blanche de Gallimard. Une pochette dépouillée avec couleur crème et police rouge. Et puis Saadia Jefferson, ça claquerait pas mal comme nom d’écrivain. Mais non, ceci est bel et bien un disque. Et quel disque! Il sonne parfois comme si Tinariwen avait fusionné avec Beirut, c’est dire le vrai-faux grand écart qu’il accomplit avec la classe la plus décontractée.

El Khat, c’est le groupe d’un charpentier-violoncelliste de Tel Aviv. Un type passé par le Jerusalem Andalucian Orchestra qui a décidé de construire lui-même ses instruments avec du bric, du broc et du brio, à savoir: des casseroles, des roues de vélo ou des bidons d’essence. Avec ce quartet, Eyal El Wahab part à la recherche de ses racines yéménites avec des musiciens venus de Pologne, du Maroc ou d’Iran. Autant dire que Saadia Jefferson a une belle gueule d’atmosphères.

A tel point qu’il en devient même presque impossible de définir sa musique. A part de dire que c’est une folk ultra contemporaine, emballante et inventive. Une folk où le travail sur les timbres, les cuivres et les cordes se révèle aussi simple que sophistiqué. Une folk traversée par un groove imparable dans le sillage des sorties du précieux label Habibi Funk. C’est du coup l’occasion de donner un coup de chapeau à la maison de disques qui sort cette pépite hivernale: les Londoniens de Batov Records qui déclarent aller de la folk délicate au gypsy-jazz le plus tapageur. Avec El Khat, ils ont trouvé leur tête de gondole idéale.

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Derrière le rideau de fer, il y avait des chars, des idéaux dévoyés comme des micros planqués — et plus étrange : du jazz. Spirituel, incandescent, mais surtout clandestin. À l’Est, on soufflait dans les saxs comme on lançait des prières ou des pierres, chez soi ou bien loin des spotlights. Behind the Iron Curtain explore un monde verrouillé, où les disques passaient sous le manteau et la liberté vibrait à chaque note. Des Carpates à l’Oural, le jazz comme insoumission, ou comme cheval de Troie — avec des étoiles plein les oreilles.

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Alliance du bout du monde entre le rappeur Mary Sue et le groupe jazz The Clementi Sound Appreciation. La recette est donnée dès le premier morceau : samples de musique folklorique d’Asie du Sud-Est mixés à des instrumentations live, sur lesquelles se pose le flow et les lyrics abstraites du MC. On se croirait en plein rap alternatif américain, mais cela nous vient directement de l’underground singapourien. Un objet sonique unique et percutant. La sono mondiale, la vraie !

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