Freddie Gibbs & Madlib

Bandana, disque de la semaine du Grigri du 22/07 au 28/07

De João Gilberto, Miles Davis disait qu’il pourrait chanter l’annuaire téléphonique que ça sonnerait quand même du tonnerre. On pourrait dire la même chose de Madlib: ses prods sont si bien ficelées que même si Freddie Gibbs rappait des pages du dictionnaire, ça claquerait sa mère avec groove (cf. le génial sample de “Crime Pays” sur lequel les exégètes du Beat Konducta dissertent déjà). Avec Bandana, le duo réussit même à faire mieux que le déjà chaud bouillant Piñata. Comme si le second tome de ce qui s’annonce comme une trilogie (Freddie parle déjà à qui veut bien l’entendre d’une part 3 baptisée Montana) avait sorti la machinerie lourde grâce au succès de l’épisode 1 – même si Madlib, en bon crâneur tranquille, a confié avoir conçu tous ces beats sur… iPad! Il suffit pour s’en convaincre de voir la liste des invités XXL de ce Bandana: Mos Def, Black Thought de The Roots, Pusha T ou Anderson .Paak.

Mais la géniale pochette du légendaire Jeff Jank donne aussi quelques indices: véritable affiche de blockuster apocalyptique, elle se déroule, comme une symbole, derrière les lettres de la colline de Hollywood. Comme si Madlib (représenté en Quasimoto avec un bandana rouge) et Freddie Gibbs (représenté en zèbre, animal-clé du tarantinesque clip de “Crime Pays”) dominaient en cachette la faune du rap game qui s’entredéchire. Et il y a quelque chose de vrai dans cette image d’un binôme génial à la Lucky Luke et Jolly Jumper. Sans faire (trop) de bruit, à l’image du clip de “Crime Pays” où Gibbs se présente comme un type simple et sans histoires pour ne pas nuire à son business de coke, le Gibbs et Madlib sortent un bon gros chef-d’oeuvre d’alliance des contraires tant le flow carabine de l’un et les samples soulful de l’autre combinent à merveille. Comme les rayures d’un zèbre en somme.

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Pour son second album en 2025, le guitariste, multi-instrumentiste et producteur japonais Takuro Okada signe un hommage à ses influences, de Sun Ra au saxophoniste norvégien Jan Garbarek (avec une reprise de son Nefertiti), en passant par la scène jazz fusion japonaise ou encore Flying Lotus. Ce type d’exercice, souvent raté chez d’autres, est ici parfaitement orchestré : chaque morceau dialogue avec le suivant, tissant un ensemble cohérent qui nous captive, parfois au bord de l’hypnose… comme ces cercles aux centres différents mais si proches de la pochette.

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Au début, les jazzmen offraient aux producteurs hip-hop la matière première idéale pour leurs instrus. Mais aujourd’hui, la boucle s’inverse : ce sont de jeunes groupes qui se laissent imprégner par l’héritage de Madlib ou J Dilla. Symbole de cette mouvance, le quintet polonais Omasta façonne avec Jazz Report from the Hood un jazz-funk live jouissif, aux rythmes enfumés, prêt à être samplé et découpé dans une MPC. Une preuve que les B-boys et les amateurs de blue note n’ont jamais été aussi proches!

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