Brahja

Brahja, disque de la semaine du Grigri du 11/11 au 17/11

Dans la vie, il faut savoir remercier. Les mères, les psys et les poètes nous y encouragent. Dont acte: merci à Superfly Records de nous avoir appris l’existence de ce disque complètement dingue, obscur et réussi. S’il fallait lui trouver des ancêtres, ce serait Alice Coltrane, Ornette Coleman, Can, le Velvet Underground ou Sun Ra. S’il fallait lui trouver des contemporains, ce serait Shabaka Hutchings, Angel Bat Dawid, Palm Unit, Matana Roberts ou Ill Considered. Et si pour nous, il a comme la magie des premiers disques, ces oeuvres de baptême qui posent un être, des tripes et un univers, il n’est pourtant pas le fruit d’un jeune padawan sorti de nulle part.

Si on creuse bien, on se rend compte que son multi-instrumentiste en chef, Devin Brahja Waldman, est pote/complice avec Thurston Moore, Patti Smith, Nadah El Shazly, James Brandon Lewis, Eric Chenaux, William Parker ou Godspeed You! Black Emperor. Bref, une sorte de best of de la création brute, onirique et underground. Si on ajoute à ça un penchant certain de ce saxophoniste-batteur-pianiste pour les rimes et les vers – il se produit souvent avec sa tante poétesse Anne Waldman, ils ont même co-fondé un inspirant label ensemble, Fast Speaking Music – on comprend que Brahja appartient à toute une famille artistique que ne renieraient pas Jim Jarmusch, John Lurie ou Tom Waits.

Sixième album de son groupe à géométrie variable (cinq titulaires et cinq intérimaires), Brahja transpire de beauté(s) térébrante(s). Tour à tour calme, furieux, chicagoan, free, doux, new-yorkais, chantant, londonien, dissonant ou hypnotique, il a clairement une dégaine de plus belle surprise de 2019. Bijou d’autant plus caché qu’il est sorti sur un label estonien qui répond au doux nom de perles rares: RR Gems Records. Mais bijou qui commence à faire parler de lui puisque le vinyle est sold out. Nouveau pressage prévu 2020. En attendant, il reste Le Grigri, évidemment.

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Derrière le rideau de fer, il y avait des chars, des idéaux dévoyés comme des micros planqués — et plus étrange : du jazz. Spirituel, incandescent, mais surtout clandestin. À l’Est, on soufflait dans les saxs comme on lançait des prières ou des pierres, chez soi ou bien loin des spotlights. Behind the Iron Curtain explore un monde verrouillé, où les disques passaient sous le manteau et la liberté vibrait à chaque note. Des Carpates à l’Oural, le jazz comme insoumission, ou comme cheval de Troie — avec des étoiles plein les oreilles.

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Alliance du bout du monde entre le rappeur Mary Sue et le groupe jazz The Clementi Sound Appreciation. La recette est donnée dès le premier morceau : samples de musique folklorique d’Asie du Sud-Est mixés à des instrumentations live, sur lesquelles se pose le flow et les lyrics abstraites du MC. On se croirait en plein rap alternatif américain, mais cela nous vient directement de l’underground singapourien. Un objet sonique unique et percutant. La sono mondiale, la vraie !

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