Alostmen

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Kologo (Strut Records)

Alostmen, c’est avant tout une histoire d’instrument, le kologo, qui donne son titre, sa texture et son âme à ce premier album. Luth traditionnel à deux cordes qui dégage une sonorité à mi-chemin entre le banjo de fortune et le berimbau de fête, on le retrouve dans les mains du leader du groupe sur la pochette. Pièce maîtresse de la culture Frafra dans le nord du Ghana, le kologo a littéralement sculpté les contours d’un folklore à lui tout seul. Il y a quelques années, le label Sahel Sounds lui avait même consacré toute une compilation, Kologo Power!, pour montrer à la fois la diversité et la cohérence des musiques qui découlent de ce minimaliste mais fertile “bi-cordes” popularisé par King Ayisoba.

Une fois ces bases posées, il faut bien se dire que l’objectif avoué de Stevo Atambire, c’est de fait sortir l’instrument de ses gonds - pas au point d’un Jimi Hendrix capable de faire rôtir sa guitare, mais presque, tant le Ghanéen électrifie le kologo au sens propre comme au sens figuré, le rendant tour à tour ultra tradi ou totalement transe. Dans son entreprise de chaufferie massive, il est secondé par un fameux maître d’oeuvre, Wanlov The Kubolor, co-fondateur des insaisissables rappeurs de FOKN Bois.

Publié sur le label anglais spécialiste de diaspora(s) africaine(s) Strut Records, Kologo dégage une intensité renversante

Résultat, les points communs entre Alostmen et FOKN Bois sont légion: un nom de baptême (faussement?) dépréciatif (les garçons perdus vs les bons à rien), des affinités avec le légendaire saxophoniste highlife Gyedu-Blay Ambolley ou le rappeur ghanéen Medikal (présents sur ce Kologo comme sur Afrobeats LOL), la facilité à dériver sans entraves entre des courants rock, rap, blues malien, afrobeat, folkloriques ou même reggae, la volonté de faire danser et penser en même temps (cf. le séduisant “Teach Me”). Sans oublier, évidemment, le featuring sur un intense “Killer Fear Die”, de l’autre partie de FOKN Bois, M3NSA.

Autour de la paire Stevo Atambire-Wanlov The Kubolor, les Alostmen rassemblent Jo Ajusiwine au goje (violon à deux cordes) et au chant, Aminu Amadu à la le batterie et Sowah aux percussions. Ce qui fait beaucoup et peu à la fois. Car au final, le groupe réussit à changer d’ambiance à chaque titre (cf. l'étonnant enchaînement tradi/rap entre “Bayiti” et “Do Good”) avec uniquement une poignée de choeurs, de cordes et de tambours. Publié sur le label anglais spécialiste de diaspora(s) africaine(s) Strut Records (Idris Ackamoor, Mulatu Astatké, Pat Thomas, Seun Kuti…), Kologo dégage une intensité renversante qui fait dire que ces enfants “perdus” ont bien plus des gueules d’enfants du paradis.

Mathieu

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