[PREMIERE] Boris Boublil et John Parish : un arrangement de Rimbaud qui fait sensation

Au Grigri, on aime les mélanges insolites, les assemblages hétéroclites, les petites folies composites, qui commencent par nous surprendre avant de devenir parfaitement logiques. C’est le cas de cet arrangement du poème « Sensation », classique parmi les classiques écrit par Arthur Rimbaud, qui vient réunir le guitariste et producteur britannique John Parish, le compositeur multi-instrumentiste Boris Boublil et le comédien Philippe Torreton. Un hommage somptueux, teinté d’une noirceur mélancolique et enfantine, qui se dévoile en exclusivité sur nos ondes en attendant la sortie de l’EP The Basement le 18 juin. 

Il existe une flopée d’artistes qui se sont déjà attaqués à la réécriture des poèmes de Rimbaud. Mais face à un poète aussi musical, provocateur et insaisissable, il n’y a généralement pas 15.000 options : on réussit (Léo Ferré), on délire (John Zorn) ou on se vautre (Jean-Louis Aubert). Boris Boublil, lui, il fait sensation. Il prend le poème et il l’étire, il en extrait l’atmosphère et la déploie avec une simplicité désarmante. On dit souvent que les bonnes interprétations sont celles qui nous font oublier l’œuvre d’origine. Il y a quelque chose de cet ordre dans cette version de « Sensation » : Boublil semble redonner quelque chose qui manquait au poème, une texture ou une ambiance, qui nous fait relire le texte sous un nouveau jour, plus onirique, plus mystérieux, plus mélancolique peut-être. 

Peut-être le confinement a-t-il fait sa part dans cette relecture de cet appel à aller batifoler dans les grands espaces. Après des mois à s’enraciner dans nos canapés, la perspective d’aller mouiller nos fesses dans la rosée, de retrouver cette « sensation » de la nature dont nous parle Rimbaud, nous semblait comme un lointain et sublime mirage. Ce confinement, il a aussi profondément changé la nature du projet d’origine. Conduit par le membre du Surnatural Orchestra, du Sacre du Tympan et de Blind Seats, le projet baptisé Mù devait être la réunion de 9 musiciens de classe internationale : Csaba Palotaï, Jesse Vernon, Morgane Carnet, Robin Fincker, Antoine Berjeaut, Sacha Toorop, Théo Girard et John Parish. 

Boublil semble redonner quelque chose qui manquait au poème, une texture ou une ambiance, qui nous fait relire le texte sous un nouveau jour, plus onirique, plus mystérieux, plus mélancolique peut-être. 

Finalement, l’album The Basement a été enregistré en solitaire par ce touche-à-tout poly-instrumentiste qu’est Boris Boublil. John Parish – producteur et musicien britannique, qui a joué notamment aux côtés de PJ Harvey ou Eels et avait déjà opéré avec Boublil sur une création autour des textes de Raymond Carver (Playing Carver) – est quant à lui venu ajouter sa guitare vaporeuse, et le comédien Philippe Torreton sa voix ténébreuse. Il en résulte un titre simple, sans grande prétention, mais qui contient tout ce qu’il doit être : une atmosphère légèrement garage-rock, doucement grinçante, subtilement vaporeuse, en résonnance avec l’ADN de ce bel EP. 

The Basement sortira le 18 juin chez Carton Records et on nous dit dans l’oreillette que les retrouvailles tant attendues de Mù au grand complet auront lieu le 26 mars 2022 à la Carène de Brest. 

Un air de Rimbaud non ? Crédits : Vaidehi Nota.

Un air de Rimbaud non ? Crédits : Vaidehi Nota.

Auguste Bergot

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Artiste chouchou du Grigri, Kassa Overall revient avec un cri d’amour pour le hip-hop en revisitant des classiques des 90’s. Ici, pas de simples copier-coller, mais de véritables réinterprétations. Si certains choix, comme A Tribe Called Quest ou Digable Planets, semblent évidents (mais réussis !), c’est dans les contre-pieds musicaux que réside la vraie surprise. La mélodie ensoleillée californienne de Nuthin but a « G » Thang devient mystérieuse et envoûtante, tandis que la folie sudiste de Back That Azz Up se transforme en comptine jazz. Et cette version de Big Poppa à la flûte ? Une des plus belles reprises rap tous genres confondus.

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Le saxophoniste, flûtiste et producteur Chip Wickham poursuit son parcours impeccable avec ce nouvel opus, The Eternal Now. Son jazz mélodique explore de nouveaux horizons, entre musique de film, groove soul et influence « Ninja Tunesque » — rien d’étonnant : le batteur de The Cinematic Orchestra est de la partie. Il s’en dégage une ambiance hors du temps, légèrement mélancolique mais profondément belle. Le disque parfait pour les week-ends d’automne ensoleillés, tasse de café à la main.

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